Un train mythique reprend du service, entre Cantal et Méditerranée
« Restez bouche bée, pendant que, au bord du Tarn, le train déambule sous le monumental viaduc de Millau ». Ainsi s’exprime The Guardian, le célèbre quotidien britannique, après l’avoir évoqué s’élançant sur le viaduc de Garabit, au dessus des gorges de la Truyère.
Le 9 novembre 2024, les Régions AURA et Occitanie, en partenariat avec l’association des amis du viaduc de Garabit, fêtaient la réouverture de la ligne ferroviaire de l’Aubrac, grâce à la modernisation de sa partie cantalienne. D’ores et déjà, un train par jour fonctionne dans les deux sens, soit au départ de Béziers, près de la méditerranée, soit à partir de Neussargues, à côté des volcans d’Auvergne. Un voyage à faire en famille, à la première occasion ! En le combinant avec des randonnées.
D’abord un peu d’histoire. C’est en 1858 que tout a commencé. Cette ligne des Causses s’est construite en trois temps. L’acheminement du charbon de Graissesac à Béziers a justifié le premier tronçon. Ensuite, entre 1872 et 1874, et dans le cadre d’une liaison Montpellier-Rodez, la ligne est prolongée par la Compagnie du Midi, de la Tour sur Orb à Millau. Puis jusqu’à Séverac-le-Château en 1880. La partie nord, entre Séverac et Neussargues, est mise en service entre 1883 et 1888.
Cette fois, c’est l’acheminement des vins du Languedoc jusqu’à la région parisienne qui explique l’intérêt de son extension, réalisant ainsi l’itinéraire le plus court entre Béziers et Paris. Et donnant la garantie d’être prioritaire sur d’autres trajets, selon la convention de 1863 signée par les compagnies du Midi, du PO (Paris Orléans) et du PLM (Paris Lyon Méditerranée).
Depuis 1932, la ligne, longue de 277km, est entièrement électrifiée. Enfin, en 2024, 43 millions d’euros d’investissement et huit mois de travaux ont permis de renouveler 26km de voies et ballast, entre Loubaresse et Andelat. Evitant d’handicaper la desserte de l’usine ArcelorMittal, installée à Saint Chély d’Apcher.
- Supports de caténaire en ogive Supports de caténaire en ogive
- Viaduc de la Crueize ou de l'Enfer en Lozère Viaduc de la Crueize ou de l'Enfer en Lozère
- Viaduc du Sailhant dans le Cantal @ photo L’étoile ferroviaire des Hauts cantons Viaduc du Sailhant dans le Cantal @ photo L’étoile ferroviaire des Hauts cantons
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Un peu de technologie s’impose également pour ce véritable chemin de fer de montagne. Il traverse, en effet, plusieurs vallées du Massif central souvent encaissées. Celles de l’Orb, de la Sorgues, du Tarn, de l’Aveyron, du Lot et de son principal affluent la Truyère, avant de terminer au bord de l’Alagnon.
Le train doit donc parcourir un tracé en dents de scie, avec des rampes pouvant atteindre 33°/°°soit 3,3%. Du fait d’un dénivelé absolu de 1039m. Une situation demandant l’utilisation de locomotives de pousse car les locomotives des années 1870 ne pouvaient pas tirer les trains lourds.
Le profil de la ligne a aussi nécessité de nombreux ouvrages d’art, 11 tunnels et 3 viaducs. Dont le plus célèbre est le viaduc de Garabit qui culmine à 122m au-dessus de la vallée de la Truyère, sur plus de 565m. Classé monument historique en 2017. Ce projet, finalisé et réalisé par Gustave Eiffel, lui fut confié par l’ingénieur des Ponts et Chaussées lozérien Léon Boyer, responsable des études et travaux du tronçon Séverac-le-Château / Neussargues.
Après son achèvement, en 1885, il fut nommé directeur général des travaux du canal de Panama où il mourut de la fièvre jaune, un an plus tard. Dernier détail technique, sur 70km, de Millau à St-Laurent d’Olt et du Monastier à St-Sauveur-de-Peyre, l’alimentation électrique (la caténaire) est suspendue aux très caractéristiques ogives Midi.
- Supports de caténaire en ogive Supports de caténaire en ogive
- Viaduc de Sénouard en Lozère Viaduc de Sénouard en Lozère
- Viaduc de Vézouillac en Aveyron Viaduc de Vézouillac en Aveyron
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Au-delà de son histoire, la réouverture de la ligne ferroviaire de l’Aubrac permet une accessibilité de la Lozère et du Cantal. En plus d’améliorer la mobilité, au quotidien, cette modernisation offre aussi de nouvelles perspectives touristiques. D’ores et déjà, une liaison journalière existe entre Béziers et Neussargues, avec un départ à 9h33 et une arrivée à 14h27.
Un parcours que l’on peut prolonger jusqu’à Clermont-Ferrand (arrivée à 16h02). Dans le sens inverse, départ à 14h36 pour un parcours de 4h54. Un aller-retour est donc envisageable dans la journée. La diversité et la beauté des paysages traversés justifient de passer une journée dans le train.
D’autres combinaisons de voyages sont également offertes, compte tenu des arrêts dans 16 gares du parcours. Par exemple, à Campagnac-gare, il est envisageable de s’arrêter à 12h11 pour un déjeuner de spécialités régionales. Et prendre le train retour à 16h51. Même opportunité à Aumont-Aubrac, à 13h14, en consommant les produits locaux de l’épicerie installée dans sa gare. Il n’y a que l’embarras du choix.
- La ligne de l'Aubrac, trajet entre Béziers et Millau La ligne de l'Aubrac, trajet entre Béziers et Millau
- Les voyageurs en Gare d'Aumont-Aubrac, en compagnie de l'un des descendants de Gustave Eiffel Les voyageurs en Gare d'Aumont-Aubrac, en compagnie de l'un des descendants de Gustave Eiffel
- La ligne de l'Aubrac, trajet entre Millau et Neussargues La ligne de l'Aubrac, trajet entre Millau et Neussargues
- La ligne des Causses, vue du train La ligne des Causses, vue du train
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Visites et randonnées sont également possibles, en fonction des temps disponibles.*
Pour découvrir encore mieux cette magnifique région, mieux vaut prévoir de passer une ou plusieurs nuits.
En plus des destinations déjà citées, de nombreuses étapes sont intéressantes : Bédarieux, Tournemire-Roquefort, St-Rome-de-Cernon, Séverac-le-Château, Marvejols, St-Chély-d’Apcher, St-Flour-Chaudes-Aigues … Sur des terres d’art et d’histoire, de randonnées, de légendes, de spécialités culinaires et de savoir-faire.
Aux visiteurs de choisir entre ces multiples itinérances que le train de l’Aubrac offre. Appelé également le train des Causses, il permet de découvrir également le Causse du Larzac, le Causse Noir et celui de Sauveterre.
Bref, un des plus beaux parcours ferroviaires européens. Où « on passe de l’hiver à l’été », comme s’en amuse Yannick, un des conducteurs de ce train mythique. Et inversement !
Guy Hébert
Remerciements à Messieurs Philippe Marassé, Jean-Jacques Marchi et Pierre Nourissier de l’association « L’étoile ferroviaire des Hauts cantons ».
Possibilité d'emporter son vélo dans le train*